Paris-Roubaix : Wout Van Aert aura-t-il digéré la fessée d’Alaphilippe pour gagner « la course de ses rêves » ?

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La Belgique peine à digérer l’énorme déception des Mondiaux de Louvain, qui ont couronné Julian Alaphilippe et déclassé Wout van Aert.Le n° 2 mondial sera tout de même l’un des grands favoris de Paris-Roubaix ce dimanche. La pluie devrait convenir à l’ancien triple champion du monde de cyclo-cross.Mais sa succession de deuxièmes places et les séquelles de l’échec mondial à domicile posent question.

La pancarte était trop lourde. Immense favori de « ses » Mondiaux, Wout van Aert s’est fourvoyé dimanche dernier à Louvain, pour le plus grand bonheur des voisins français et de l’intrépide Julian Alaphilippe. Le cyclisme belge a pris une grosse claque, et c’est les joues encore rougies que le surdoué polyvalent de la Jumbo-Visma va tenter ce week-end de réaliser un autre de ses rêves : remporter Paris-Roubaix.

« Je suis convaincu qu’il sera prêt », veut croire dans L’Avenir son compatriote Peter Van Petegem, lauréat 2003 de la Reine des classiques. « Quand cela ne veut pas, on doit l’accepter et ne pas se lamenter éternellement. L’Enfer du Nord représente une belle manière de retrouver rapidement les sommets. »

Plutôt que de lamentations, on peut parler de mea culpa, à travers les propos de van Aert après sa triste 11e place à Louvain. « Je suis fier de l’équipe mais je suis déçu. Toute l’équipe était là, pas moi. » Jasper Stuyven a fini au pied du podium alors que le prodige Remco Evenepoel s’est défoncé pour rien, et a tenu à le faire savoir.

« J’aurais pu devenir champion du monde », a ainsi asséné le jeune effronté (21 ans) mardi soir, sur le plateau de l’émission Extra Time Koers de la chaîne flamande VRT. Pour lui, c’est clair : l’encadrement de la sélection belge l’a sacrifié et n’a jamais envisagé de plan B quand son aîné de 27 ans a coincé. « Remco en a dit plus à la télé que dans le bus [de l’équipe], a répliqué ce dernier, qui a aussi mis en cause le comportement d’Evenepoel, trop prompt selon lui à attaquer à 180 bornes de l’arrivée. Je peux comprendre que des critiques naissent quand le résultat escompté n’est pas celui récolté, mais c’est dommage d’avoir un discours qui prend un virage à 180 % en interne. »

En forme trop tôt ?

On le voit, l’ambiance est aussi plombée Outre-Quiévrain que le temps annoncé dimanche à quelques kilomètres de la frontière. Déjà que le doute entoure van Aert avant son potentiel rendez-vous avec l’Histoire…

« Peut-être a-t-il été en forme trop tôt, à la différence de Julian Alaphilippe, avance David Lehaire, journaliste sportif à La Dernière Heure, en référence au Tour de Grande-Bretagne dominé par le Belge devant l’Anglais Hayter et notre Alaf’national. Paris-Roubaix, c’est la course de ses rêves, qu’il n’a pas pu courir depuis deux ans. Il en aurait été le grand favori s’il avait été champion du monde. Là, il en sera l’un des favoris. »

Super-héros tout terrain

Un nouvel échec ferait tache sur sa panoplie de super-héros tout-terrain. « Aujourd’hui, c’est l’une des deux stars du cyclisme belge avec Remco Evenepoel, juge David Lehaire. C’est le meilleur coureur du pays à l’heure actuelle, le plus complet. » Ces deux dernières années, l’enfant d’Herentals, la patrie du mythique Rik Van Looy a empilé six étapes du Tour de France ainsi que quatre classiques (Stade Bianche et Milan-San Remo en 2020, Gand-Wevelgem et Amstel Gold Race en 2021).

Cet été sur la Grande Boucle, l’ancien triple champion du monde de cyclocross avait été capable de gagner à Malaucène après une double dose de Mont Ventoux, puis d’enchaîner victoire écrasante sur le chrono de Saint-Emilion et succès de prestige au sprint sur les Champs-Elysées. Des perfs époustouflantes pour le commun des mortels comme pour pas mal d’observateurs avertis.

Mais van Aert a aussi enquillé depuis un an une impressionnante série de deuxièmes places qui pourrait, si on cédait à la facilité, convoquer l’esprit de Raymond Poulidor, le grand-père de son rival néerlandais Mathieu van der Poel. Pour ne pas faire trop long, on se contentera de citer les courses en ligne du Mondial 2020 à Imola et des Jeux olympiques de Tokyo, ainsi que les contre-la-montre des Mondiaux 2020 et 2021.

Le premier sacre planétaire d’Alaphilippe en Italie avait vu le cador belge, déjà considéré comme le grand favori, piégé dans la dernière ascension, alors que son équipe avait pourtant, cette fois, couru à la perfection. Au Japon, esseulé parmi ses rivaux, il n’avait rien pu faire face à la forme insolente de Richard Carapaz. Quant aux chronos, van Aert est tombé chaque fois sur un Filippo Ganna stratosphérique. « C’est la médaille d’argent de trop », avait ragé le Flamand lors du récent Mondial.

Moins populaire qu’Evenepoel

« Pour nous, c’est toujours un vainqueur, un cycliste au-dessus du lot qui a plus de performances cette année que les autres, assène toutefois Joeri De Knop, reporter au Het Laatste Nieuws, quotidien belge néerlandophone. Mais son image a quand même un peu changé avec toutes ses médailles d’argent. Cela le rend aussi un peu humain. » Non pas que l’homme soit antipathique, attention, prévient notre collègue flamand ! « Il est bien aimé, c’est un gars sympa, les pieds sur terre, qui vient d’un petit milieu chaleureux, celui du cyclo-cross, et d’une famille humble. Il est apprécié dans les deux parties du pays. »

Le sportif belge de l’année 2020 jouit quand même d’une plus grosse cote sur un versant linguistique que sur l’autre. « Van Aert est très limité en français, remarque David Lehaire. Remco [Evenepoel] est originaire de la banlieue de Bruxelles et si sa langue maternelle est le flamand, il s’exprime bien en français. Van Aert, plus jeune, était plus froid alors qu’Evenepoel, qui est arrivé dans le vélo comme un ovni, a encore cette image de gamin qui fait des blagues. Dans un sondage, il faisait d’ailleurs partie des deux sportifs préférés des Belges derrière l’heptathlète Nafissatou Thiam. »

Click Here: gold coast suns 2019 guernseyLa pluie annoncée, une aubaine

Selon cette enquête parue en janvier dernier, van Aert ne pointait qu’à la 7e place. S’il succédait à son compatriote Philippe Gilbert, dernier lauréat en date de Paris-Roubaix, l’homme aux cheveux gélifiés devrait grappiller quelques rangs au prochain palmarès. La pluie annoncée pour dimanche pourrait servir les plans du n° 2 mondial (Pogacar lui a repris ce jeudi la tête du classement UCI) et lui rappeler ses jeunes années à batifoler dans les sous-bois humides.

« Van Aert va dominer les classiques durant quelques années, assène Van Petegem, décidément un grand fan. Ce n’est pas parce qu’il a perdu aux Mondiaux qu’il faut l’enterrer. » Ni lui promettre la deuxième place derrière van der Poel, Asgreen ou pourquoi pas Sénéchal.

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